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Sylvain Kerspern - dhistoire-et-dart.com Inaliénabilité des oeuvres dart : à propos dune autre rupture. Ci-contre |
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Au moment où le rapport Rigaud sur la question tarde à être remis, je voudrais dire deux mots sur le projet de renoncement au principe dinaliénabilité des collections publiques françaises. |
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Ensuite, ce genre de démarche repose sur un principe simple : largent est le régulateur du marché. Cette notion est toute relative dans le domaine de lart, tout le monde le sait. Parler de loffre de la loi et de la demande a quelque chose dabsurde en la matière, et produit des effets incroyablement contrastés. Je prendrai un seul exemple récent, qui concerne - qui sen étonnera? - Jacques Stella, peintre récemment réévalué, et dabord sur le plan artistique! Une peinture représentant La présentation de la Vierge au Temple est passée plusieurs fois en vente (le 5 décembre 2006, par exemple, chez Sothebys à Londres) ces derniers mois, sans succès. Il est vrai que létat nétait pas bon, le tableau semblant passablement ruiné. Fallait-il pour autant renoncer à lauthenticité? La dernière tentative, chez Sothebys en novembre 2007, sous une attribution pourtant réservée, fut la bonne : alors que lestimation était à nouveau basse (5000/7000 livres), laissant planer des doutes sur le caractère autographe, lenchère sest envolée à plus de 42000 livres. Pourquoi? Vraisemblablement sur la foi de ce que Jacques Thuillier a suggéré entre-temps à son propos, à savoir quil sagissait de lun des éléments du décor commandé par Anne dAutriche pour le Palais-Royal (en concurrence avec Philippe de Champaigne, Laurent de La Hyre, Charles Poerson...) en 1644-1645. |
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Transposons à dessein le cas dans la perspective de labandon de linaliénabilité, autrement dit, supposons que le tableau ait fait partie dune collection publique, un musée, qui, devant une certaine désaffection de la critique à son égard, aurait souhaité sen défaire en espérant pouvoir en tirer des subsides pour acheter quelque chef-doeuvre bon teint. Laurait-il laissé filer à la première vente, à la seconde, ou à la troisième? Statistiquement, on doit remarquer quil avait plus de chances de partir aux deux premières - dautant que lintention aurait été, ni plus ni moins, de sen débarrasser... Et quand bien même : admettons quil nait été vendu quà la troisième un prix record. Aurait-il fallu alors le laisser filer au moment où, manifestement, son importance historique aurait été enfin reconnue?... On voit labsurdité du raisonnement. Lhistoire de lart ne compte plus les réévaluations opérées dans les dernières décennies. Autant dire quil y a de fortes chances pour considérer que les laissés pour compte daujourdhui seront les vedettes de demain, suivant la dynamique propre aux recherches en histoire de lart. Libéraliser ainsi linstitution muséale revient donc à aller à lencontre du développement de la discipline. Ce serait, sous couvert dune mise à lhonneur, un nouveau coup porté à notre discipline, au moment où les options envisagées pour son enseignement obligatoire à lécole tendent déjà à confirmer les pires craintes. Sylvain Kerspern, Melun, le 17 février 2008 |
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Pour des éclairages complémentaires, on fera confiance au suivi que lon peut trouver sur Latribunedelart.com, notamment la conclusion provisoire de la ministre au rapport remis par Jacques Rigaud. Ajoutons-y le discours dun précédent ministre, Renaud Donnedieu de Vabres (appartenant à la majorité présidentielle en exercice), évoquant cette inaliénabilité comme un principe intangible dans le cadre ... de la défense du projet du Louvre Abou Dabi. P.S. (12 décembre 2009) : "Décentralisation", démantèlement et privatisation du patrimoine national. Le parlement étudie actuellement la possibilité pour l'Etat de céder n'importe quel monument historique lui appartenant à toute collectivité territoriale qui en ferait la demande; en prévoyant d'ores et déjà que ladite collectivité puisse ensuite la revendre au domaine privé. Je n'ai pas grand'chose à ajouter au commentaire pertinent de Didier Rykner, si ce n'est que la logique à l'oeuvre est la même que celle qui prévoyait de pouvoir déclasser pour vendre des éléments des collections publiques, que j'ai combattue, arguments à l'appui, ci-dessus. Il faut rappeler sur ce point le principe de "l'exception culturelle" supposé extraire de la logique économique la sphère culturelle. |
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