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Sylvain Kerspern - dhistoire-et-dart.com | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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![]() Les Stella |
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Catalogue de l'œuvre de Jacques Stella : Ensemble - La Fronde (1649-1651), mosaïque |
Histoire de Vénus et Cupidon, dit aussi Les jeux de Vénus et d'amour de Jacques Stella Mise en ligne en mai 2023 |
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Si Claudine a certainement contribué à entretenir la mémoire de son oncle, elle n'est pas allée jusqu'à restituer tout à fait sa création, rattrapée par une religiosité sensible jusque dans ses inventions. Parmi les victimes de ces œillères, L'histoire de Vénus et de Cupidon, « partie desdits tableaux sont dans une fausse porte derrière la tapisserie à la grand chambre » dans le testament et inventaire de Claudine, que Bon Boullogne, lors de son expertise après le décès de mademoiselle Stella appelle Les jeux de Vénus et d'amour. Des nombreuses entreprises signalées par Félibien, sans doute au rapport des Bouzonnet, cette suite vraisemblablement aussi tardive que les autres n'est pas mentionnée. En conséquence, elle reste largement à retrouver et ses contours, encore difficiles à percevoir. Autour de quelques peintures réapparues dernièrement et de possibles modèles ou équivalents, j'essaie de répondre ici à cette double question, en espérant que cela fasse resurgir de quoi compléter l'ensemble. |
Données historiques et premiers candidats. |
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Claudine donne au moins le nombre de sujets, 12, et la dimension moyenne de chacun d'entre eux, 1 pied de haut sur 1,5 de large, soit environ 32,5 x 49 cm. La suite figure dans le legs universel destiné à Anne Molandier et son époux, Joseph Lacroix, à Lyon. Elle ne semble apparaître dans aucune des mentions d'œuvres de Stella depuis et il est vraisemblable qu'un autre nom soit rapidement venu remplacer le sien. Les Molandier étant aussi liés aux Demasso, il n'est pas impossible qu'une piste anglaise n'émerge quelque jour.
Vénus, Vulcain et l'Amour. Huile sur toile. 69 x 57 cm. Coll. part. |
Vénus et l'Amour taillant son arc. |
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Historique : Vente Le Floc'h Drouot 11 octobre 2015, lot 12 (École Italienne du XVIIè s. Toile marouflée sur carton légèrement agrandie sur la droite)
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La première composition en date que j'ai envisagé de rapprocher de notre suite est passée en vente en octobre 2015 et représente Cupidon taillant son arc sous la conduite de Vénus. Plusieurs points soutiennent cette intuition. Notons d'abord la pose de la jeune femme, de profil, comparable à celle que Stella lui donne dans le tableau Pardo-Motais qui présente une coiffure pareillement élaboré, et un Amour au canon et au type voisin.
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D'après (?) Jacques Stella. Vénus et l'Amour taillant son arc. Toile. 29 x 44,5 cm (coupé dans le haut?). Vente Le Floc'h Drouot 11 octobre 2015, lot 12. |
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Le Branle, Pastorale 6. 50,5 x 62 cm. Coll. part. |
Vénus (ou Erigone??) proposant une grappe de raisin à Cupidon. |
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Historique : Vente Herbette Drouot 13 décembre 2015, lot 8 (Entourage de Lairesse. Paire d'huiles sur panneau en pendant, comme Erigone et l'amour. 33 x 23 cm.). Vente Herbette Drouot 30 septembre 2018, lot 7 (idem). Localisation actuelle inconnue.
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Quelques semaines après l'apparition du tableau qui vient d'être abordé, une paire non sans rapport mais en hauteur passe dans une vente, rapprochée du peintre liégeois Gérard de Lairesse, montrant deux personnages dénudés dans un paysage; les sujets sont identifiés pour l'un comme Erigone et l'Amour (avec une grappe de raisin) (ci-contre à gauche), l'autre, Vénus et l'Amour (ci-contre à droite). Je reviens plus bas sur le second à propos de l'original qu'il reprend, aujourd'hui au musée de Stockholm mais il faut d'ores et déjà noter que l'une des principales variantes consiste en l'agrandissement dans la hauteur d'une composition initialement conçue en largeur, rompant avec le format de la suite héritée par Claudine, donc avec une stricte identification.
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D'après Jacques Stella. « Erigone » (?) et l'Amour. |
D'après Jacques Stella. Vénus et l'Amour tirant à l'arc. |
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Ventes Herbette 2015 et 2018. Paire d'huiles sur panneau en pendant. 33 x 23 cm. | ||
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Le Frappe-Main, Pastorale 4. 48,5 x 60 cm. Coll. part. | ||
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Vénus et Cupidon s'entraînant au tir. |
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Toile. 37 x 46 cm. (en moyenne) Stockholm, Nationalmuseum.
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Le tableau acquis par Stockholm est, en quelque sorte, venu couronner les prémices d'une redécouverte partielle de la mystérieuse suite sur Vénus et l'Amour que forment les peintures discutées jusqu'ici, apparues dans les années qui précèdent sa vente. Il aura sans doute manqué toutes ces étapes aux personnes qui ont émis des doutes sur l'attribution à Stella après l'acquisition. En dehors des remarques de Didier Rykner dans son l'article, je n'ai pas lu beaucoup d'arguments véritables contre. Le souci d'approfondir les lignes que j'ai produites pour la soutenir alors aurait tout de même permis de s'assurer du lien indéniable avec notre artiste.
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Ventes van Ham 2019 et Ader 2021. Toile. 37 x 46 cm. (environ) Stockholm, Nationalmuseum |
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La fenaison, Pastorale 1. Gravure. BnF. |
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L'embaumement du Christ. Toile. 50,5 x 61,2 cm. Montréal, Musée des Beaux-Arts. |
Paysage au laboureur. Gouache. 23,4 x 32,5 cm. Ottawa, Musée des Beaux-Arts du Canada. |
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Le tableau de Stockholm a été copié en hauteur, nous l'avons vu. Quels enseignements peut-on en tirer?
Dans sa vente, la copie est mise en pendant d'une autre peinture au décor indiscutablement commun à l'une des Pastorales, resserrant décidément le lien avec Stella.
En ajoutant la troisième composition (et le tableau Pardo-Motais), on peut remarquer une Vénus à chaque fois bien moins vêtue que celle de Stockholm. C'est pourquoi j'ai douté de la tunique blanche, probable repeint de pudeur.
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La version Philocale. (novembre 2018) |
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Le tableau de Stockholm. (mai 2019-janvier 2021) |
Trois sujets en petit format montrant Vénus et Cupidon, personnages d'un suite de douze tableautins sur leur histoire par Stella inventoriée par sa nièce, et qui s'appuient sur des décors paysagers si proches de ceux des Pastorales, faut-il encore aller chercher un autre artiste alors même que sa redécouverte n'en est plus à une surprise près, ou du moins à ce qui peut, au premier regard, sembler tel? La haute qualité du tableau de Stockholm, pour sa part, appelle un nom de premier plan. L'érotisme froid, quand bien même il prend place dans un paysage baigné d'une chaude lumière rare chez le Lyonnais, l'extrême soin de la facture, la typologie de l'enfant voire de sa mère, tout cela n'est pas si éloigné de son art que ce que les réserves exprimées sur l'attribution pourraient le laisser croire. Je laisse à d'autres le soin d'apporter une éventuelle alternative mais il faudra qu'elle soit argumentée. Espérons de nouvelles découvertes; elles ne pourront nier le lien avec Stella. |
Iconographie. |
L'iconographie fait partie du mystère qui entoure cette suite.
Commençons par considérer ses sujets en faisant abstraction des peintures discutées jusqu'ici. Il s'agit d'une suite supposant une narration, allant au-delà d'ouvrages abordant dans un épisode unique la déesse et son fils, en particulier l'éducation du second par la première. Du moins un artiste de quelque ambition peut-il arguer, pour l'entreprendre, de précédents prestigieux à partir des exemples isolés de Raphaël, Dürer, Corrège ou Carracci - sans parler de Stella, et du tableau Pardo-Mottais...
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(Ci-dessus) P. Scalberge, Scola d'amore, planche 11. Nancy, M.B.A
(Ci-contre) O. Fialetti, Scherzi d'amore, planche 9. British Museum |
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(Ci-dessus) Vénus, Vulcain et l'Amour. Toile. Coll. part. (Ci-contre) O. Fialetti, Scherzi d'amore, planche 7. British Museum |
De l'ensemble de 12 sujets chez Scalberge et de 13 chez Fialetti, quelles correspondances y-a-t-il avec les peintures réunies ici sur le nom de Stella? Sans surprise, la taille de l'arc et l'exercice du tir en font partie. Pour autant, seul l'Italien a montré Cupidon façonnant son arme. C'est l'avant-dernier sujet de son cycle, qui se conclut sur l'Amour s'apprêtant à tirer à l'arc. Tel est l'objectif, au fond, donné par l'artiste, et un objectif constructif, tout différent de l'amusement de Scalberge. Ce dernier montre aussi l'entraînement mais avant la moitié du cycle, comme une péripétie parmi les avanies subies par Vénus de la part de son fils, voire comme la préparation du retournement final.
Le troisième sujet rapproché de la suite de Stella (ci-contre) n'apparaît pas dans les deux autres et me semble en fait rarissime, au point que l'expert de sa vente aura privilégié l'identification comme Erigone et Cupidon. Tout spécialiste de Stella s'accordera à y percevoir l'accent souriant propre au peintre, déployé dans un paysage de Pastorale. Ce ne serait pas non plus la première fois que le Lyonnais se distingue jusque dans l'iconographie.
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O. Fialetti, Scherzi d'amore, planche 13 et 14 (sur 14). British Museum |
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Stella en vint-il, tout de même, à représenter dans sa suite éducative la déesse châtiant son fils? Carracci l'avait fait comme Giovanni Luigi Valesio (c. 1583-1633)(ci-contre), un artiste que Stella pourrait avoir connu s'il est bien le Vanezio qu'il mentionne dans sa lettre de Rome à Langlois en février 1633. Une peinture récemment apparue que je crois de Claude Mellan (1598-1688) dans un intérieur à dispositif à rideau témoigne de la veine satirique de l'artiste (ci-contre), que notre Lyonnais ne partageait pas avec son ami. Le tableau doit appartenir à la période romaine de Mellan et Stella put également le voir mais alla-t-il jusqu'à intégrer le sujet à sa suite pour autant? Cela semble sortir du propos et du tempérament de l'artiste, mais serait-on, avec lui, à une surprise près si d'aventure, il en était ainsi?
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Giovanni Luigi Valesio (c.1583-1633), Vénus châtiant l'Amour. Gravure. 20,4 x 13,7 cm. British Museum. |
Ici attribué à Claude Mellan (1598-1688), Vénus châtiant l'Amour. Toile. 118 x 95 cm. Coll. part. |
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Marcantonio Raimondi d'après Raphaël, Vénus à sa toilette et l'Amour. Gravure. BnF. |
Laurent de La Hyre (1606-1656), L'entrée du Christ à Jérusalem. Toile. Ca. 400 x 308 cm. Paris, église Saint-Germain-des-Prés. |
Le cadre de ces années peut encore expliquer la chaude lumière du paysage, qui semble en avoir dérouté plus d'un. Elle ne doit pas témoigner d'une autre main mais d'une capacité toujours intacte de l'artiste, à se renouveler, par la curiosité, jusque dans le travail technique. Je n'ai pas manqué de souligner déjà son regard attentif sur la production de son confrère La Hyre et il n'y aurait rien d'étonnant à le voir en pleine émulation à nouveau avec lui, par exemple vers le temps de leur participation au décor du Carmel du faubourg Saint-Jacques (1652-1653), dans le registre du paysage solaire, tout en entretenant sa dimension composée dans le cadre de sa propre poésie.
S.K., Melun, avril 2023 |
Bibliographie :
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Courriels : sylvainkerspern@gmail.com. |
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