Sylvain Kerspern - dhistoire-et-dart.com
Jacques Stella - Catalogue - Florence, oeuvres datées de 1620-1621
1620
Le songe de Jacob, gravure
Le duomo de Florence , dessin
1621
Le vendeur de tripes pour chat, gravure
Cérémonie du Tribut à la fête Saint-Jean, gravure
La foire du Prato, dessin
Catalogue : Florence, mosaïque ; Ensemble - Table Stella - Table générale
Contacts : sylvainkerspern@gmail.com
Mise en ligne le 30 septembre 2013
Le songe de Jacob
Eau-forte. 9,3 x 13,4 cm (coup de planche). Signé Jacq. Stella fecit (en bas à gauche) et daté 1620 (en bas à droite)

Historique : Florence, Gabinetto Disegni et Stampe degli Uffizzi (8344 st. sc.)

Bibliographie : cat. expo. Lyon-Toulouse, 2006, p. 58; Thuillier 2006, p. 44 (non retrouvé); Kerspern 2008 (Thuillier II); Kerspern décembre 2012.
Cette pièce importante semble rare, le seul exemplaire repéré étant conservé à Florence.

Jacques Stella disposait d’un modèle toscan important, la version peinte par Cigoli en 1593 (Nancy, Musée des Beaux-Arts). Certains détails y invitent, comme le bras s’abandonnant au sol, et le costume contemporain. On peut néanmoins se demander si Stella ne réagit pas plus directement à la composition peinte par Elsheimer (Städelsches Kunstinstitut, Francfort) : on y retrouve notamment la situation dans un bois avec une échappée latérale plongeant vers la mer dans laquelle se jette un fleuve. Les éléments de nature morte jonchant le sol soulignent le souci du détail familier, dont Stella ne se départira pas. Tout cela, ajouté au calme des attitudes, tend à évacuer tout aspect spectaculaire ou surnaturel au sujet, conférant à la présence divine un caractère intime.

S.K., Melun, septembre 2013

Vue du duomo de Florence
Crayon noir, plume et encre noire, lavis. 28,1 x 40,3 cm. Inscrit en haut à gauche le domme de floranse; signé et daté en bas à droite Ex. Jacq. Stella Pictor (?) Lugd. 1620 (figures et inscriptions au verso non vues)

Historique : vraisemblablement resté, dans le fonds d’atelier; coll. Bouzonnet Stella (sous n°10 des livres de dessins; cf. cat. exp. 2006, p. 252) - Londres, coll. Henry Harris - Vente Christie’s Londres 8 juillet 2008 Paris, n°12 avril 2013 n°90 (non vendu).

Bibliographie : Byam-Shaw 1957-1959; cat. exp. 2006, p.25, 43.
Cette feuille est passionnante à plus d’un titre. Elle souligne d’emblée l’intérêt de Stella pour l’observation directe, appliqué à la vue urbaine; ici la cathédrale Santa Maria delle Fiore vue de l’est (on distingue le campanile de Giotto sur la gauche). Elle le situe aussi dans la suite fondamentale de Brunelleschi dans le travail de mise en perspective des bâtiments, qui plus est de l’une des prouesses architecturales du Florentin; mais aussi dans celle de son propre père, paysagiste dont on connaît des vues semblables (voir ici). Enfin - mais justement, est-ce un hasard? -, elle précise, pour la première fois, des ambitions de peintre dans la signature.

S.K., Melun, septembre 2013

Le vendeur de tripes pour chat
Eau-forte. 8,3 x 11,1 cm (coup de planche). Signée et datée en bas à gauche Jacque Stella fecit 1621 (2 inversé).

Historique : Florence, Gabinetto Disegni et Stampe degli Uffizzi (8345 st. sc.).

Bibliographie : cat. expo. Lyon-Toulouse, 2006, p. 63, 65; Thuillier 2006, p. 44; Kerspern 2008 , p. 122, 124.
De format comparable au Songe de Jacob, cette gravure montre les progrès accomplis par Stella dans la technique de l’eau forte : il a gagné en autorité mais aussi en souplesse. La gradation des plans, des ombres et des lumières est désormais parfaitement maîtrisée.

Le contexte florentin est rappelé par le Duomo reconnaissable dans le lointain. Fabienne Bertin (2006) en a identifié plus précisément le site : proche l’église San Bartolomeo à Monte Oliveto. La proximité d’un établissement militaire hospitalier pourrait servir à identifier le pauvre homme disputant la bouillie aux chats. Le sujet semble ainsi illustrer une expression italienne, rappelée par Sylvain Laveissière en 2006 : « non c’é trippa pe’ i gatti » ; il n’y a rien à en tirer. Le personnage principal, invalide de guerre, trouverait là un secours circonstanciel.
L’attitude de la femme sur le pas de sa porte laisse ouverte les interprétations : est-elle ironique? veut-elle chasser les chats? Pour Stella, du moins, elle sert à désigner le motif principal, pour appeler au commentaire ou à la réflexion. Dans le petit ensemble connu que Stella a voulu situer et dater de Florence, hormis la Flagellation et le Songe de Jacob, il s’est attaché à la représentation de la vie et du cadre florentin. On mesure là le rapport à Jacques Callot, tout autant les rapprochements dans ses objets d’études que la différence de traitement, par la mesure, déjà et l’empathie suscitée, loin des recherches spectaculaires du Lorrain.

S.K., Melun, septembre 2013

Cérémonie des Tributs à la fête Saint-Jean, dit aussi Les chevaliers de Saint-Jean
Eau-forte. 45,8 x 61,5 cm (coup de planche). Signée et datée dans la dédicace au bas SERENISSIMO / FERDINANDO II. MAG. ETRURIAE DUCI/Jacobus Stella Pictor Lugdunensis / Dedicat, consecratque / ipse invenit et delineavit / 1621; Texte explicatif dans la marge : Offerta de Tributi, e censi de paliotti di Seta, Vasi D’argento, e Ceri - che si fa in Fiorenza ogn’ann° d'avanti al Ser.no: Gran’ Duca di Toscana : dalle Città Terre e luoghi de Suoi Stati, e da SSri Raccomandati, e feudatari la mattina della Solennita di San’ Gio’ Baptista; en bas à gauche : con privilegio; 3 autres états correspondant à trois réimpressions en France, par Langlois puis Mariette.

Historique : Paris, BnF, Estampe, Da 20; Lyon, Bibliothèque municipale....

Bibliographie : Robert-Dumesnil 1844-1871, n°5; Le Blanc 1856, t. 3, p. 588-589, n°6; Thuillier 1960; cat. expo. Lyon-Toulouse, 2006, p. 58-60; Thuillier 2006, p. 46; Kerspern 2008 , p. 122.
Premier grand chef-d’oeuvre de Stella, cette gravure est aussi une sollicitation auprès du nouveau Grand-Duc de Toscane visant à remplacer Jacques Callot, reparti en Lorraine. Celui-ci avait représenté la même cérémonie mais dans une pièce de bien moindre ambition. Le choix, au fond, s’imposait : elle montre les hommages au souverain venant de tout son territoire le jour de la fête du saint patron de la ville; Stella lui-même s’y joignait par son travail, la dédicace et sa présence sur un toit, faisant le relevé pour la gravure.

Stella, conscient de la qualité de son oeuvre, l’avait conservée mais en 1633, au moment de quitter Rome et l’Italie, donc de tourner une page importante de sa vie, il veut s’en défaire. Manifestement, ce sera auprès de celui à qui il avait confié son intention, son ami François Langlois, qui en fera tirages en France. Curieusement, au même moment, un graveur italien plagie directement son travail, pareillement dédié au Grand-Duc : il s’agit d’Antonio Francesco Lucini (1605-apr. 1661), ancien aide de Callot de retour en Toscane alors, ce qui ne manque pas de sel.

Pour une suite à cette estampe, voir ci-dessous.
La foire du Prato
Plume et encre brune, lavis d’inde et rehauts de gouache blance sur papier brun. 45,8 x 64,3 cm.

Historique : Collection Francis Douce, legs en 1834; transfert depuis la Bodleian Library, 1863. Oxford, Ashmolean Museum (WA.OA882).

Bibliographie : cat. expo. Lyon-Toulouse, 2006, p. 60-61.
Ce dessin fait partie des belles découvertes de l’exposition de 2006. Manifestement, Stella a voulu donner suite à la Cérémonie des Tributs : le format est identique, le cartouche indique la fonction préparatoire à la gravure, et le rapport de la figure humaine au paysage, vaste panorama florentin, est le même. Cependant, aucune gravure réalisée ou simplement mentionnée par nos sources (en particulier Mariette) ne correspond : manifestement, Stella en est resté là. De fait, malgré l’absence de toute signature ou de date, ce dessin ne peut prendre place que dans les derniers mois de sa présence en Toscane, et pour correspondre à la foire représentée qui accompagne la fête de la naissance de la Vierge, en septembre 1621.

L’absence de réaction du duc, sans doute, les perspectives romaines et, peut-être l’incitation particulière de Simon Vouet, qui passe en Toscane au retour de son séjour à Gênes en novembre, auront mis un terme à cette entreprise. Demeure une des grandes pages de Stella, déjà attentif aux multiples activités de la rue sur lesquelles il pose un regard bienveillant.

S.K., Melun, septembre 2013

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